mardi 17 juin 2014

Bilan XI

11 mois.
Ce bilan inattendu qui n'était pas sensé exister. 
Mais je suis heureuse d'être encore ici pour l'écrire. 

Mon 11e mois en Malaisie fut très occupé et s'envola aussi rapidement qu'une mouche sentant une attaque venir. Il a été entamé, après mon retour d'une semaine d'entraînement à Ampang, par mon camp de fin de séjour AFS. Cette fin de semaine fut mémorable et chargée en émotion. C'est la fois où, durant mon Farewell Dinner, mon père d'accueil me regarda avec un sourire et me disa: "maintenant j'ai une fille". C'est aussi cette fois où, mains dans les mains, mes accolites AFSers et moi avons médité sur notre expérience en Malaisie, celle-ci étant déjà terminée pour tous ces gens, mais dont le dernier chapitre n'a pas encore été conclu pour moi. C'est également la fin de semaine des au revoir envoyés à la majorité de mes confrères. Finalement, c'était aussi quelques jours de pur bonheur, entourée par des gens formidables qui ont su rendre cette année mémorable. Je n'arrive pas à croire que cela fait déjà près d'un mois. Tant de choses ce sont passées depuis le temps mais je me sens tout de même comme si tout ça était hier. 

Ensuite, j'ai passé la semaine qui suiva entre badminton et amis. Puis, la suivante, à voyager en Malaisie, voir des amis et passer un peu de temps avec ma mère d'accueil. 

Le 9 juin, j'ai ensuite été témoin, non physiquement mais bien mentalement, du départ de mes chers amis, retournant dans leurs pays respectifs. Je n'ai pas essayé de planifier à aller les voir à l'aéroport parce que ça aurait été définitivement trop dur. Je suis déjà assez sensible comme ça. Mais ça faisait tout de même quelque chose de savoir qu'ils étaient tous en train de s'envoler. J'ai pensé à eux de lundi le 9 tôt le matin à mardi soir, me visualisant où ils pourraient bien se trouver à ce moment, et aussi où je serais moi-même si je les avais suivis. Maintenant, je vois leurs photos sur facebook avec leurs amis et leur famille, dans cet endroit qu'ils appellent Home. Ça m'arrive aussi souvent de rêver à certains d'entre eux. Ça me rend un peu triste. Pas triste parce que j'aimerais bien être de retour à la maison aussi, mais bien triste parce que je sais que nous sommes maintenant tous séparés par des milliers de kilomètres, et qu'une barrière nommée argent et temps nous empêche de nous atteindre. C'est comme un jolie vase qu'on éclate sur le plancher, et dont les morceaux s'envolent dans la pièce, se retrouvant ainsi bien éparpillés, mais sans bon samaritan pour les regrouper et les recoller ensemble. Je serai ce morceau un peu plus loin que les autres, seul dans son coin.

Depuis le 8 juin jusqu'à maintenant, je suis de retour à Ampang, où je m'entraîne temps plein avec One Badminton Academy. Je suis contente d'avoir ces trois semaines d'entraînement où je peux vraiment focusser sur le badminton, sans avoir trop de choses d'autres à me soucier. Je sens que je m'améliore et je passe du bon temps à la fois. Je rencontre de nouveaux gens super sympathiques et j'aime ça. De plus, je vais participer à un tournoi ouvert les 28 et 29 juin dans cette même académie. C'est une merveilleuse façon de finir l'année, moi qui n'aie pas joué dans un tournoi depuis plus de 14 mois. C'est quelque chose qui me manque beaucoup. C'est dur de s'entraîner et de rester motivé lorsque nous n'avons aucune compétition pour nous pousser un peu. 

Depuis quelques semaines, et encore plus depuis que mon programme AFS est terminé, je regarde autour de moi d'une toute autre façon. J'observe beaucoup. Je remarque des choses qui auraient passées inaperçues avant. Je souris à tout ce que je vois qui est propre à la Malaisie, et dont je sais que je ne reverrai plus durant longtemps bientôt. J'apprécie ce qu'il y a autour de moi différemment, et je m'efforce à voir tout plus intensément pour que ça reste bien gravé dans ma mémoire. Ces chiens sans abri et sals sur le bord des routes. Ces forêts tropicales  montagneuses tout autour de moi. Ces arrêts d'autobus avec les gens qui attendent, si magnifiques dans leur diversité. Ce marchand chinois qui vend des bao (pâtisserie ronde fourrée cuite à la vapeur) sur le bord de la route. Cette portion immense de riz qui m'est servie et que je finis tout de même par toute ingurgiter. Cette chaleur enivrante à laquelle j'ai arrêté de me plaindre depuis longtemps. Ce petit stand à prières bouddhiste sur le bord de la route, avec ses bâtons d'encens. Ces bosses sur les rues pensées afin de ralentir les conducteurs. Toutes ces langues parlées autour de moi - malais, plusieurs dialectes chinois, tamil, anglais, indonésien, javanais, etc. Les petits restaurants installés sous des châpiteaux, où je déjeune du riz et autres accompagements pour 2$. Ces enfants qui jouent au badminton avec des volants de plumes dans la rue devant leur maison. 

Sinon, outre apprécier mes derniers instants ici, je me dois évidemment de penser à mon retour imminent. J'ai bien sûr très hâte de revoir ma famille et de passer quelque temps avec eux autour du Québec avant de revenir à Rouyn-Noranda, mais c'est difficile pour moi de penser plus loin que ça. C'est trop étrange de m'imaginer de retour dans cette petite ville abitibienne. Je ne me sens pas prête à rentrer au cégep. C'est comme si j'avais toute perdue ma motivation, trop incertaine de ce que je veux dans la vie. Mes autres amis AFS semblaient plutôt excités à l'idée de commencer le collège, alors que de mon côté, c'est quelque chose d'effrayant. Resuivre le modèle de vie pré-déterminé que la majorité s'efforce de respecter. C'est comme si je sens que c'est un obstacle à ma vie. J'ai trop de projets de voyage et le goût de découvrir le monde, mais étudier ne me permettra pas tout cela. Mais bon, je devrai m'y faire. Et patienter. La vraie vie va me rentrer de dedans. 

Enfin, je vais très bien. Le futur me fait peur, mais j'imagine que tout va bien aller au final. Je suis heureuse d'avoir eu l'opportunité de vivre cette expérience, même si elle me laisse plutôt perplexe dans toute ma perplexité. 

Et le onzième mois s'envola comme la maison de paille du premier petit cochon. Flouf. 

J'aimerais bien construire les trois dernières semaines qu'il me reste en brique... Mais je manque de temps. 

On se revoit donc dans un coup de vent!

À+

Alice




Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire