dimanche 18 août 2013

Bilan I

1 mois.
1 mois s'est écoulé depuis que j'ai franchi le sol malaisien pour la première fois.

J'ai été bousculée par tellement d'émotions durant ce dernier mois. Mais ça ne commence pas là. Tout le processus s'est entamé en octobre dernier, alors qu'une idée vague et farfelue me passait par la tête. J'ai eu la bonne idée de suivre cette idée, malgré les nombreux mots de découragement, d'inquiétude et de désappointement que j'ai reçu. Je me suis souvent sentie jugée, mal-comprise. Je me suis rattachée aux paroles de ceux qui croyaient en cette idée, qui me trouvaient courageuse et qui m'ont soutenue.

Tout le long processus auquel j'ai dû passé m'a paru une éternité. Monter un dossier, envoyer mon application, mener ma collecte de fond... Mais surtout, l'attente. Continuer ma vie normale en sachant très bien que j'étais sur le point d'aller vivre dans un autre pays pendant un an et juste... attendre. J'avais l'impression que ce moment n'arriverait jamais, c'était si loin, si irréel. Puis, recevoir les billets d'avion. Quoi de plus concret que d'avoir dans ses mains la date, l'heure et l'itinéraire qui allait me mener à l'autre bout du monde. Pourtant, ça restait flou dans ma tête. C'est quand même quelque chose de difficile à réaliser. C'est finalement au moment de la descente finale, profitant de la vue que m'offrait le hublot, que je regardais les grandes villes lumineuses et que je me disais: «Ça y est. Je vais vivre ici pendant un an.» Un petit sourire au bord des lèvres, mais la tête encore pleine de questionnements. Je me plongeais dans l'inconnu. C'est quelque chose de vraiment terrifiant. Terrifiant, mais tellement excitant à la fois.

J'aurais dû écrire ces lignes il y a un mois de cela. Pourtant, c'est seulement maintenant que je suis vraiment capable de comprendre ce que je ressentais à ce moment là. Je crois que je laissais simplement les choses aller, sans nécessairement avoir les mots justes pour exprimer ce qui se passait.

Ce premier mois n'a pas toujours été facile. Au tout début, j'observais beaucoup et je réapprenais à vivre. Ce qui m'étais acquis depuis si longtemps ne valait plus rien. Que ce soit la manière de manger, la politesse, la façon de saluer, les mesures d'hygiène, l'endroit où on enlève nos souliers ou simplement la façon de faire signe à quelqu'un de s'approcher, tout était du nouveau. Cette période agréable où tout était fantastique parce que tout était si nouveau et différent n'a pas duré si longtemps. Comme je devais attendre plusieurs jours avant de commencer l'école, j'ai passé plus d'une semaine seule à la maison pendant que ma famille d'accueil était au travail ou à l'école. Après avoir épuisé mes notifications facebook, mes e-mail, les quelques livres que je m'étais apportés et ma capacité corporelle au sommeil (qui est vraiment très grande, soit dit en pensant), je me retrouvais sans nulle autre occupation. Qu'est-ce qu'on fait quand on n'a plus rien à faire? On pense. On pense à notre famille qui commence à nous manquer. On pense à la piste cyclable qui nous permettrait de s'évader et de suer un peu. On pense à notre piscine qui nous permettrait de nous rafraîchir avec cette chaleur intense. On pense à nos amies avec qui on pourrait déconner et jaser de tout et de rien. On pense à du fromage si inaccessible mais pourtant tant délicieux. On pense au maudit décalage horaire qui fait que tout le monde est en train de dormir et ne peut te répondre. On pense aux succulentes salades que notre mère et notre belle-mère nous cuisineraient. On pense à nos paires de shorts et nos camisoles qui ne demandent qu'à être portés, mais qui doivent modestement restés dans les étagères par respect pour notre famille d'accueil musulmane. On pense aux nombreux partys auxquels on pourrait aller et simplement s'amuser sans se soucier du reste. On pense à notre tant attendu permis de conduire qui est maintenant si inutile dans ce porte-feuille. On pense à notre pays. On s'ennuie. On se questionne. Était-ce une bonne idée? Pourquoi avoir quitté ce chaleureux mais froid Québec, qui m'a si gentiment bercée pendant 17 années? Pourquoi ne pas être simplement restée dans le confort, comme tout le monde?

Et puis l'école qui est venue me sauver juste à temps. Encore une fois pleins de découvertes. J'ai enfin pu commencer à me faire des amis. Cette première semaine d'école a été formidable. Tout le monde m'a si bien accueillie, autant les enseignants que les étudiants. Pleins de personnes sont venues me parler, m'ont mise à l'aise. Chaque «Hi Alice» que j'entendais lorsque je marchais dans les corridors, sans toujours savoir qui était la personne qui me regardait avec un sourire, me faisait un grand plaisir. Même si je ne comprenais rien aux notes de cours que je prenais, je me disais que j'allais peut-être les relire un jour et y voir plus clair.

Ensuite, le Hari Raya. En découvrir encore plus, toujours, sur la culture. Rencontrer des nouvelles personnes, encore et encore. Être accueillie avec tant de bonté peu importe où je vais. J'ai adoré plonger dans la culture comme ça, mais j'avoue que parfois, c'était difficile. Passer des journées consécutives avec des gens qui ne parlent que malais autour de moi et ne comprendre que quelques mots sans contexte n'est pas toujours agréable. Même si j'étais avec une vingtaine d'autres personnes autour d'un repas, je me sentais souvent seule. Les gens se parlaient entre eux, riaient, communiquaient, alors que tout ce qui me restait était mes propres pensées. Mais bon, encore une fois, je me dis que peut-être que lorsque je vais retourner au Kampung (village) la prochaine fois, je vais remarquer une amélioration. Et puis, l'autre fois d'après, encore plus. Puis, je vais me mettre à comprendre peu à peu ce que les gens se disent. Un jour, je vais peut-être même pouvoir intervenir dans les discussions et m'exprimer. Ne pas tout comprendre tout de suite, ça fait partie de la game, et je le savais avant de m'y embarquer.

Pour finir, j'ai eu la chance de rencontrer, cette semaine, une Malaisienne d'origine chinoise qui part bientôt pour le Canada avec AFS. J'ai passé beaucoup de temps avec elle et sa famille, ce qui m'a permis d'en découvrir beaucoup sur la culture chinoise. Je vous réserve un article là-dessus bientôt. J'ai aussi eu un premier entraînement de badminton aujourd'hui. Ça a fait vraiment du bien d'enfin faire un peu de sport! Puis, demain, je recommence l'école après un congé de deux semaines. Et je me sens bien. Je crois sincèrement que se tenir occupé est la clé du succès.

Donc voilà, malgré les hauts et les bas, je suis heureuse. Vraiment. La Malaisie est fantastique. Je trouve vraiment merveilleux de voir trois cultures différentes vivre ensemble et en harmonie dans un même pays. Avec toute cette diversité, il y a tant de choses à découvrir. Durant le dernier mois, j'ai l'impression d'avoir appris plus de choses que si j'avais lu 100 pages différentes sur Wikipédia. Pourtant, j'ai aussi l'impression de n'avoir encore rien vu. Je sais qu'il me reste encore tant de choses à découvrir, et c'est ce qui rend le tout encore plus intéressant.


Malgré toutes les différences; la culture, la langue, la couleur de peau et tout le reste, je ne me sens pas vraiment comme si j'étais à l'autre bout du monde. Parce que peu importe la culture ou la façon de vivre, les gens me semblent si... humains. On est tous un peu pareils au fond. On vit, et on essaie de le faire de la façon qui nous semble le mieux. Je suis sincèrement incapable de mettre des mots clairs et précis sur ce que j'essaie de dire. Je vais donc emprunter les mots d'une autre étudiante étrangère en Malaisie: « It's just so different. But eventually you realize it's somehow, in the smallest way, the same. You realize people are people and whether its here, there, or anywhere, happiness, and sadness, and love; they're all universal, and that's one familiarity you cling onto.» . Tout en étant si loin, je ne me suis jamais sentie aussi proche du monde.

Ce premier mois a été éprouvant, fascinant, instructif... Et ce n'est que le commencement.

Je voudrais dédier cet article à mes parents qui m'ont soutenue et continuent de le faire dans ce grand projet. Je voudrais sincèrement vous remercier parce que même si ça ne paraît pas toujours, j'apprécie vraiment l'expérience que je suis en train de vivre, et c'est en très grande partie grâce à vous si j'ai cette chance. Merci énormément.

Alice



Source: http://sincerelykaley.blogspot.com/2013/08/smile.html



 

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire